Tuesday, June 20, 2006

(DOUTEUSES PERTINENCES...)

"Gênes dans ce temps achetait tout le blé de l'Europe."

Une heure durant, je me suis efforcé, sans succès, de dégager une signification à ce passage trouvé dans une traduction française des "Letters on Italy" de Lady Morgan. Je n'arrivais pas à concevoir le comment ou le pourquoi de cette nécessité à acheter le blé (corn) de toute l'Europe -- ni en quoi du blé, sous quelque forme que ce fût, pouvait concerner le sujet traité. Mais après m'être procuré l'ouvrage original, mes yeux tombèrent finalement, à bout de patience, sur la phrase: "...the Genoese, at this period, bought the scorn of all Europe by... etc., etc." ("...les Gênois, à cette époque, s'étaient acheté le mépris -- scorn-- de toute l'Europe en... etc., etc.") Eh bien, dans le cas présent, le traducteur est beaucoup moins fautif que Lady Morgan et son péché mignon: le verbum insolens. Je ne puis voir en effet quelle force espérer ici de l'emploi aussi saugrenu du verbe "acheter", dès lors qu'il s'agit de mépris -- il est des cas, j'en conviens, où l'expression ferait pourtant merveille -- ni me résoudre à condamner le Français dans sa décision de supprimer le "s" comme simple coquille.


(Extrait du 7° feuilleton des "Marginalia" -- Juillet 1848.
Non reproduit dans l'édition posthume de 1850, il n'apparaît qu'à partir de 1875 dans l'édition britannique organisée par J. H. Ingram.
Notons qu'aucun ouvrage de Lady Morgan ne s'intitule "Letters on Italy", et que celui consacré, en 1821, à l'Italie n'épouse nullement la forme épistolaire...
"Verbum insolens", comme dénoncé par Cicéron dans son "Orateur -- A Marcus Brutus", VIII, 25, signifie "mot insolite, inadéquat, sans pertinence"...)

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