Sunday, September 19, 2004

(NOBLESSE)

(...) Il n'est pas de tartuferie plus méprisable que celle habituée à dénigrer le métier de comédien -- métier qui, en soi, cumule toutes les qualités capables d'élever et d'ennoblir, et qui n'implique absolument rien d'avilissant. Si, parmi les acteurs, certains, ou beaucoup, voire quasi tous mènent une vie dissolue, le mal ne vient nullement de la profession elle-même, mais bien des contingences malheureuses qui accablent celle-ci. (...) Le théâtre tient sa noblesse des possibilités considérables qu'il offre au développement du génie, dans des proportions qu'on ne retrouve nulle part ailleurs. Car c'est bien l'esprit du génie, nous l'affirmons, qui confère au théâtre son caractère noble, son caractère sacré -- par delà les railleries du sot et les indignations de l'hypocrite. Le coeur de l'acteur saignera décidément beaucoup s'il ne peut faire fi des médiocres, fussent-ils des rois. L'auteur de cet article est lui-même le fils d'une actrice -- il s'en est toujours glorifié -- et il n'y eut jamais de comte plus fier de son titre, que lui d'être le descendant d'une femme qui, quoique bien née, n'hésita pas à vouer au théâtre sa courte carrière de génie et de beauté. (...)


(Extrait du feuilleton de critique dramatique: "Au Théâtre", du 19 juillet 1845.
Non repris dans l'édition posthume de 1850.)

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