Monday, June 21, 2004

(POESIE ET PLAGIAT)

"(...) Le sentiment poétique suppose une vive appréciation du beau avec un intense désir de se l'assimiler. C'est ainsi que ce que le poète admire profondément devient par ce fait même en partie inséparable de son âme, y prenant comme un second développement, si bien que le poète, qui subit ainsi la pensée d'un autre, ne peut passer pour s'en emparer. Il la croit très sincèrement SIENNE, croyance qui ne peut être contredite que par la preuve sensible de cette réelle origine de la pensée dans le volume d'où elle provient: car il est inévitable qu'après un long laps de temps, cette origine se trouve oubliée, comme bien souvent la pensée elle-même. Mais la plus légère association peut la ranimer; elle se développe alors avec toute la vitalité d'une naissance nouvelle; sa parfaite originalité ne fait pas pour le poète l'ombre d'un doute; aussi personne ne sera-t-il plus grandement étonné que lui, quand, une fois écrite et imprimée, on viendra l'accuser de plagiat. Il en résulte à mon avis que le danger d'éprouver de pareils accidents est en raison directe du sentiment poétique, de l'aptitude aux impressions poétiques; et toute l'histoire littéraire démontre, en fait, qu'il n'y a, pour les cas les plus fréquents et les plus flagrants de plagiat, qu'à feuilleter les oeuvres des poètes les plus éminents."

(Conclusion du post-scriptum au long feuilleton polémique "Imitation -- Plagiat...." dirigé essentiellement contre Longfellow -- avril 1845. Traduction d'E. Lauvrière -- 1904.)

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